Nicolas39 - Pêche à la mouche

La pêche à la mouche sur le blog de Nicolas Germain, un Jurassien amoureux de sa rivière, la Haute Rivière d'Ain.
Centre de pêche en Bosnie.

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Mot-clé - Harle bièvre

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mardi 1 novembre 2022

Article de presse sur le Harle.

Ce court billet pour vous partager un article de presse parut ce jour. Difficile d'être sur la même longueur d'onde entre passionnés des oiseaux et des poissons...

lundi 18 avril 2022

Romain nous parle des oiseaux piscivores (vidéo)

Je publie aujourd'hui une vidéo tournée sur le plateau du chasseur français. Vous y verrez l'interview de Romain. Ce jeune pêcheur passionné nous parle de la problématique des oiseaux piscivores en faisant un focus sur cette espèce allochtone qu'est le harle bièvre. Ce sujet est parfois complètement éclipsé des préoccupations de nos fédérations et pourtant, il devrait être au centre de la table. Cela devient une urgence !

Merci Romain pour ton intervention. Pour souvenir, cet article complet au sujet du Harle à lire => Harle Bièvre.

vendredi 14 janvier 2022

La pêche n'est jamais fermée finalement.

Étant cloué sur le canapé depuis quelques jours pour cause de Covid bien corsé, j'en profite pour rédiger un nouvel article sur mon Blog. Je souhaite revenir aujourd'hui sur un sujet qui est souvent débattu : la prédation des oiseaux piscivores. Pour être clair, je ne veux pas faire ici un plaidoyer pour l'extermination de ces deux espèces ou pour leur totale protection. J'ai bien entendu mon avis sur la question, mais je voulais avant tout témoigner en tant qu'observateur attentif et studieux. Je peux le faire cette année car j'ai repris mon permis de chasse après presque 20 ans d'arrêt afin de m'adonner à une autre passion qu'est la chasse du gibier d'eau.

Durant toutes ces années où je ne chassais plus, j'ai toujours continué à me rendre régulièrement à la rivière pour observer les truites en période de fermeture. Je prenais même un grand plaisir à les filmer en automne lors des dernières éclosions ou encore en plein hiver lors du frai. Je me suis simplement rendu compte cette année que je faisais ces observations toujours dans la même plage horaire, soit pour la balade digestive du début d'après-midi pour profiter d'un maximum de lumière. Depuis la mi-septembre et la reprise de mon activité en quête des canards sur la rivière d'Ain, je sors à toutes heures de la journée. De plus, les sorties sont encore plus nombreuses. Si je plante le décors de cette façon, c'est pour vous faire comprendre que si l'on croit connaitre la vie d'un bout de rivière par cœur, il suffit parfois de le regarder d'une manière différente pour s'apercevoir que l'on passe à côté de pas mal de choses.

Lever du jour glacial ! Les oiseaux sont déjà passés.

Toutes ces années, je voyais régulièrement en période de fermeture des cormorans ou des harles sur des linéaires de la rivière d'Ain. Bien que cela m'agaçait un tantinet, je n'avais pas l'impression qu'ils y passaient leur vie non plus. Souvent, il m'arrivait de ne pas en voir d'ailleurs. Quelle ne fut pas ma surprise cette année !!

Il est vrai que je suis passé d'environ 4 à 5 heures d'observations hebdomadaires (ou je regardais plus souvent le fond de l'eau que le ciel d'ailleurs) à 15 / 20 heures de présence par semaine sur la rivière. Ce n'est pas rien. Le plus important c'est que sur ces 20 heures, je peux être au bord de l'eau aussi bien au lever du jour comme au coucher du soleil en passant par toutes les heures de la journée. En premier lieu, j'ai appris encore et encore sur le comportement des truites qui me fascine sincèrement mais surtout, j'ai pu me rendre compte de la présence journalière (et j'insiste sur ce mot) des cormorans et des harles sur la rivière.

L'après crue hivernale au soleil, un régal pour les yeux.

Sur notre linéaire, les cormorans qui se nourrissent essentiellement de poissons adultes le font forcément dans 95% des cas sur des truites ou des ombres. Il y a également quelques chevesnes et un ou deux brochets mais peu. Les harles eux prélèvent dans les plus petites tailles. Les vairons en font les frais mais aussi les juvéniles des poissons plus gros de la rivière, donc des truites et des ombres. Avec ce duo, toutes les classes d'âge sont touchées.

Je sors en général le mercredi, le vendredi, le samedi et le dimanche sur la rivière. Depuis mi-septembre, il y a eu une période de deux semaines fin novembre où j'ai vu très peu d'oiseaux piscivores. Sinon, j'en ai vu à chaque sortie. Pour être plus parlant, cela fait environ 60 sorties en ayant vu des oiseaux pêcher sur notre linéaire de seulement 3 kilomètres. 60 jours...Que l'on peut j'imagine au moins doubler pour les jours où je n'y suis pas allé mais restons sur ce que j'ai vu. Du concret quoi.

Des exemples, j'en ai quelques uns. Comme ce dimanche de septembre en fin d'après-midi où j'ai dérangé une famille de harles (9 individus) dans un radier à l'amont de notre parcours. Ou encore en matinée d'octobre où j'ai vu passer sous l'eau en pleine chasse des grands cormorans...Là où la veille gobaient 3 ou 4 truites...Je me souviens aussi d'un tout début de partie de chasse où je suis arrivé sur une gravière en voyant une truite d'environ 30 centimètres complètement affolée sortir de l'eau pour venir presque s’échouer sur les graviers...10 secondes après son retour à l'eau aidé par mes soins un cormoran sortait de l'eau à 20 mètres de moi. J'ai cette image d'un vol de 18 individus montant la rivière et passant au-dessus de ma tête peu de temps après le lever du jour. Je vois encore les écailles brillantes d'ombrets sortir du bec d'un harle mâle devant moi. Combien de fois j'ai été le témoin de la formidable technique de pêche groupée des harles. Ces oiseaux sont des pêcheurs fantastiques et incroyablement efficaces.

J'ai vu parfois en une sortie plus de 20 oiseaux sur le parcours. Tous pêchaient bien entendu. Parfois seulement 1. Le plus souvent 4 ou 5. Je n'ai pas fait de grandes études, j'en conviens. Mais je tente malgré tout de faire des additions en comptant simplement un poisson/jour par oiseau vu pour me rendre compte des prélèvements réels entre septembre et février, période où ils sont le plus présents chez moi. Si j'y arrive, vous pouvez le faire aussi.

Si je pensais que ce n'était pas grand chose il y a encore peu, je peux vous dire qu'après ces quelques mois passés au bord de l'eau, j'ai revu ma copie. Encore une fois, je ne cherche pas à convaincre ou donner des leçons, je relate ici, sans amplifier les faits, ce que j'ai vu depuis mi-septembre. Après, chacun en fera ce qu'il en veut. Ce n'est pas une étude scientifique ou autre, juste le témoignage d'un type qui passe énormément de temps au bord de sa rivière. Il me semble que cela doit être dit également.

Merci de m'avoir lu.

samedi 6 mars 2021

2 jours sans muselière. Vive Goumois, vive la pêche !

Le mot muselière est sans doute un peu fort, mais la perspective de passer deux jours sans mettre de masque me remplissait de joie ! Il en faut peu de nos jours pour rendre un homme heureux. Le spectre d'un futur confinement partiel ou plein a fini par me décider de prévoir un séjour sur Goumois pour faire mon ouverture. La dernière que j'ai fait sur les terres de la Franco-Suisse datait de 2013 en compagnie, en autre, de mon ami Michel Flénet. Il manquera tristement sur les berges du Doubs cette année et les suivantes, assurément.

C'est comme une veille d'ouverture et un peu comme un gosse que j'ai préparé mes affaires. J'avais un besoin fou de m'éloigner de mon quotidien et plus particulièrement de mon étau. Une immense envie de me retrouver seul canne à la main s'était emparée de moi. Les paysages de la vallée du Doubs étaient le cadre parfait pour palier mes envies de solitude en plein air.

Les fleurets au fond du sac et c'est parti !

Je vous avoue que malgré toutes les idées positives que j'avais en tête, le trajet pour me rendre sur Goumois m'a fait froid dans le dos. Je n'ai pas comptabilisé les parcelles noircies de lisier, mais c'était pas chouette à voir et accessoirement à sentir. Même dans nos rêves les plus joyeux, la réalité de nos vies nous rattrape inexorablement.

Arrivé le long du Doubs et pas encore équipé, je devine une silhouette de pêcheur tenant sa canne de la main gauche ! L'ami Alex était déjà en approche. Nous avons eu la même crainte d'un possible confinement. Il fallait pêcher, quoi qu'il en coûte ! J'ai abandonné Alex à ses petites affaires où il excelle comme personne pour attaquer un peu plus en aval. Je n'en crois pas mes yeux, le Doubs est somptueux ! La belle crue hivernale a fait le boulot. C'est splendide.

Le fond du Doubs.

Cette vallée reste unique en son genre. On y respire l'esprit encore sauvage. Je le disais encore ce matin à mon ami Denis, la rivière d'Ain est magnifique, mais elle n'a pas cet aspect sauvage du Doubs. En tous les cas, je ne le retrouve pas personnellement. L'ambiance est totalement différente.

L’entrée du bois de la Saulsotte.

Les stigmates de la dernière crue !

La pêche dans tout ça. Il a fallu attendre patiemment l'ouverture légale de la truite pour les tenter de nouveau. Bien qu'ayant une deuxième catégorie à portée de voiture, je me refuse d'aller embêter les truites lors de leur période de repos bien méritée. Ces longs mois à attendre et enfin, le jour J est arrivé. J'ai débuté très fort ! J'étais monté en 16 centièmes et gammare JFD en 12. Je pensais débuter la saison chez moi. Pas vraiment conseillé pour le Doubs et ses truites hypers méfiantes du début de saison ma combinaison diamètre de fil taille de nymphe. Pourtant, sur la première truite vue, elle est venue prendre le gammare comme une fleur. Un beau poisson de 40-45 qui aurait pu être le premier. C'était sans compter sur un ferrage bien rouillé ! Manqué ! Je vois encore le blanc de la gueule, magnifique et tragique ! Je me suis marré tout seul tellement j'ai été mauvais !

Derrière, je repère une truite sous son caillou. Elle n'était pas calée, mais en poste tout en restant sous sa cache. J'ai passé mon gammare plusieurs fois sans réaction de sa part. Heureusement, j'avais les sparklers magiques de mon ami Julien Daguillanes. Premier passage assez près du caillou et la truite est sortie comme une folle furieuse pour s'emparer de ma guirlande ! Quelle scène !

Première truite de 2021.

J'ai passé un très bon moment. Le peu de connaissances que j'ai de ce parcours est très préjudiciable lorsque les truites sont si peu actives. Il faut connaitre les bonnes berges, les bons moments. J'ai eu l'impression de tout faire à l'envers mais là n'était pas l'essentiel. Non, le poisson n'est que la cerise sur le gâteau. Le fait de me trouver sur les berges du Doubs était amplement suffisant. J'ai eu le plaisir de croiser l'ami Marcel avec qui j'ai passé un agréable moment bien qu'il m'ait appris la disparition peu après Michel de notre ami commun Yvan. Un autre passionné du Doubs maintenant disparu. Pour les plus anciens et amateurs du forum Mouche-Fr, vous le connaissiez sous le pseudo Doubsrivière. Bien triste nouvelle.

J'ai aussi, pour mon plus grand plaisir, croisé la route de mon ami Bruno. Un homme et pêcheur incroyable connu alors que j'étais le tout jeune disciple d'André Terrier. Comme je sais qu'il t'arrive de me lire mon cher Bruno, j'ai été très heureux de te revoir. Merci pour ce bon moment passé en ta compagnie.

Après avoir promené la canne plusieurs heures, j'ai retrouvé un semblant de motivation alors que la pluie tombait. Je suis allé finir ma journée sur le pré Bourrassin vide de pêcheurs. Enfin si j'ose dire, car il y en a eu un paquet de passage durant cette journée. Heureusement pour moi, il m'ont laissé cette belle fario qui s'est laissée leurrer à distance par un petit gammare JFD en 16. Je suis descendu pour l'occasion en 13 centièmes.

Belle truite du Doubs.

Le lendemain matin, j'ai attaqué beaucoup plus tôt. Le Bourrasin était pour moi seul ! Ce lieu reste enchanteur. L'atmosphère y est particulière.

Le pré Bourrasin.

Les truites dehors étaient encore moins nombreuses que la veille. La journée s'annonçait compliquée. La seule truite vue sur la gravière s'est emparée de mon petit gammare noué la vieille. Pas capot, c'est déjà pas rien !

Truite prise en nymphe à vue.

Il y a eu, au contraire de la veille, une activité de surface vers 14 heures déclenchée par une éclosion de petites olives. J'ai vu quelques très beaux gobages mais je n'ai pas eu le courage de reprendre la voiture pour aller sur la berge suisse. De plus, j'ai vu un pêcheur pratiquer le long des zones boisées. Pour se placer correctement pour pêcher les gobages, il se positionnait à chaque fois dans l'eau. Et comme j'ai compris la phrase du règlement intérieur qui stipule l'interdiction de renter dans l'eau avant le 1er Juin, je me suis abstenu.

Malgré ça, j'ai pris une truite en sèche devant les blocs de l'ami Radix avec une passe-partout olive. J'ai décroché un autre poisson que j'ai fait monter à la limite de la distance à laquelle je pouvais propulser ma mouche. J'ai également pris deux méchants refus !

Le Doubs reste magnifique malgré les malheurs qui lui tombent sans arrêt sur la tête. Je suppose, un peu comme chez nous, que le fond de la rivière va se transformer dans les semaines à venir. Ce que j'ai vu dans les champs devrait finir dans la rivière. C'est inévitable et tellement triste.

Les perces-neige de la Franco-Suisse.

Si le lisier était le seul mal qui touche cette rivière à l'image des autres rivières du coin, mais non. Là, sur le plat de la Verrerie, 4 harles bièvres sur une frayère d'ombres (cliquez sur la photo pour l'agrandir). Je les ai vu faire. Un mâle et 3 femelles. Ils n'ont qu'à en manger un chacun par jour durant la période du frai...Je vous laisse faire le compte. Les ombres eux étaient en stress absolu. Un autre sujet à considérer sur les baisses de population, c'est indéniable.

Je suis rentré à la maison avec le plein de bol d'air. Qu'est qu'on respire mieux sans ce maudit masque ! Vive Goumois, vive la pêche !

dimanche 3 novembre 2019

Dossier : le harle bièvre.

Voilà un article que je voulais faire depuis longtemps. Malheureusement, je n'avais pas les connaissances nécessaires. Mais j'ai dans mon entourage des personnes qui maitrisent le dossier parfaitement. Voici un point complet et précis sur cet oiseau que nous avons tous croisé un jour au bord de l'eau. Bonne lecture et n'hésitez pas à partager autour de vous. Merci.

Nicolas : Pour les personnes qui n’ont jamais croisé ce volatile, pouvez-vous nous le décrire ?

PPVA : De la taille d'un Colvert, les mâles sont blancs avec la tête noire, et les femelles grises avec la tête rousse. Les premiers sont très visibles, contrairement aux secondes qui passent souvent inaperçues.

Cette forte ressemblance (pour les non-initiés !) avec le Colvert combinée à l’extrême discrétion des femelles ont permis à cette espèce de coloniser nos rivières sans attirer l’attention.

Son impressionnante dentition et son bec crochu lui permettent de capturer entre 300 et 700 grammes par jour de poissons de 3 à 40cm, mais aussi reptiles et autres batraciens :

Nicolas : Est-ce que cet oiseau est une espèce autochtone ? Selon la réponse, comment le harle est-il arrivé dans nos régions ?

PPVA : Non, contrairement à une idée mensongère et fausse véhiculée par certains pseudos écolos, cette espèce n'est en rien autochtone, pour preuve cette étude menée par l’INRA, le CNRS et le muséum d’histoire naturelle :

«Les données paléontologiques et archéozoologiques permettent d'avancer que le Harle bièvre ne s'est pas reproduit en France pendant l'Holocène. Allochtone de France, il a colonisé une importante fraction de l'est du pays au cours de la seconde moitié du 20ème siècle. Piscivore, l'impact de ses populations sur ses nouveaux écosystèmes d'accueil n'a pas fait l'objet d'études en France.»

Etude citée à lire ICI.

On sait donc qu'elle ne s'est pas reproduite en France depuis au moins 11000 ans, a été clairement classée comme « allochtone d’apparition récente » par ces chercheurs, dont les travaux sont utilisés dans toutes les fiches descriptives des espèces animales de France. On nous dit également souvent qu’il serait un « migrateur », et ce depuis toujours : On se demande alors pourquoi aucun ancien dans le Jura ou dans l’Ain ne se souvient d’eux, et surtout pourquoi la LPO aurait « introduit » une espèce migratrice dans les lacs alpins (un migrateur ne s’introduit pas !), tout en leur créant des nichoirs, comme indiqué dans ce bulletin de l’association datant de 1985 :

« Sur les conseils de P. GÉROUDET, nous mettons à profit l'arrière-saison pour installer une dizaine de nichoirs et lâcher quelques jeunes issus de nids lémaniques. En 1975, un immature lâché l'année précédente est complètement domestiqué et fréquente les canaux du centre-ville. Le2 mai, deux couples sont présents sur le lac et le 6 juin j'observe une femelle avec deux poussins d'à peine 15 jours. C'est la première preuve de nidification sur le lac d'Annecy »

Bulletin cité à lire ICI.

D’ailleurs, la LPO continue aujourd'hui de leur créer des nichoirs, quand ce ne sont pas certaines communautés de commune, comme celle d’Alby-sur-Chéran, qui le font. Ces preuves factuelles et facilement vérifiables de leur caractère allochtone et des introductions dont il a bénéficié ont tendance à rendre fou de rage les défenseurs de cette espèce. Malheureusement pour eux, les faits sont les faits : le Harle n’est pas la Loutre, le Héron Cendré ou le Martin Pêcheur, que nous devons protéger, c’est une espèce allochtone qui, en plus de perturber des équilibres déjà fragiles, rentre directement en concurrence avec nos véritables espèces autochtones emblématiques citées précédemment.

Nicolas : Que peut-on dire sur ses populations actuelles et leurs évolutions ?

PPVA : Si l’on prend les derniers recensements de la LPO dans le département de l’Ain, il y aurait une 30aine d’oiseaux sur le bassin versant de l’Ain : J’espère que les gens qui habitent dans notre département et lisent ce chiffre ne sont pas en train de s’étouffer, car il y a de quoi… Il suffit pour cela de trainer sur notre secteur en février/mars, lorsque la végétation n’a pas trop démarré et que la visibilité est bonne: impossible de faire quelques dizaines de mètres de rivière ou de s’arrêter sur un pont sans en croiser plusieurs, des groupes souvent composés de 5 à 10 individus, et c’est comme ça sur les 50km de basse rivière d’Ain, mais aussi sur quasiment tous les affluents ... Dans la foulée, au début du printemps, les femelles donnent naissance à des couvées de 8 à 12 canetons, qui ont éclot dans un nid situé à plusieurs mètres de haut bien à l'abri de tout prédateur potentiel :

Vidéo d'un nid de harle à voir ICI.

Pour compléter le tableau de son incroyable capacité de prolifération, en cas de décès de leur mère, les canetons orphelins vont quasi systématiquement être adoptés par une autre femelle :

Les taux de survie sont donc énormes : 80-90% des juvéniles arrivent à l'age adulte. Une fois la rivière atteinte, ils n'ont une fois de plus aucun prédateur connu :

 Ils sont également beaucoup moins farouches que les Cormorans, et n’hésiteront pas à fréquenter le centre des villages ou des villes.

Une autre grosse différence avec le Cormoran : ses capacités d’envol, pour un canard plongeur, sont remarquables : il n’a pas besoin de beaucoup de place pour atterrir ou décoller, et fréquente donc des secteurs plus petits et boisés que les Cormorans. Cerise sur le gâteau, son espérance de vie est de plus de 10 ans, l’une des plus importantes chez les canards. Ce sont tous ces facteurs cumulés qui en font un véritable désastre pour nos poissons, et encore plus pour les autres espèces piscivores autochtones, beaucoup moins prolifiques ou habiles.

Nicolas : A-t-on une idée de l’impact du Harle sur les populations piscicoles de nos rivières à truites et peut-être plus globalement sur la ressource en poisson en générale ?

PPVA : En théorie, c'est un canard qui préfère les lacs aux eaux claires, riches en cyprinidés. Enfin, ça, c'est la belle théorie des fiches descriptives de l'espèce. Dans les faits, ils sont bien plus présents sur les rivières salmonicoles que sur nos lacs, l'exemple le plus criant est leur absence quasi totale de l'ensemble des grandes gravières de l'Ain, pourtant riches en cyprinidés et aux eaux cristallines. Par contre, impossible de ne pas les croiser sur l’Ain et surtout sur nos plus petits affluents, où la seule espèce présente est souvent la truite Fario. Là, toutes les AAPPMA qui ont des Harles sur leurs baux connaissent la suite: un nettoyage en bonne et due forme de toutes les classes d'âge de poissons, de 3 à 40cm. Ce qui ne vous laisse, en pêche scientifique, que quelques truitelles de l'année et autres gros poissons de plus de 40cm pour constater les dégâts.

Idem d’un point de vue halieutique, où les parcours fréquentés par les Harles ont perdu presque tout intérêt pour nos pêcheurs : c’est un véritable désastre, aussi bien biologique qu’économique.

Les études disponibles sont limitées : La seule étude francophone a été commandée par le canton de Genève en 2016, mais n’a (étonnement !) jamais été publiée par les autorités suisses : On ne vexe pas un électorat d’écolo-citadins pro Harle et Cormoran.

Pour le reste, les britanniques ont quelques années d’avance, et estiment entre 50 et 98% de prélèvement par les Harles : plus la rivière est salmonicole, et plus les prélèvements semblent importants (98% des smolts consommés sur certaines rivières !). Ils commencent d’ailleurs à les réguler :

« Harle bièvre : Comme les cormorans, les harles bièvres sont des prédateurs opportunistes qui se regroupent souvent en grand nombre pour tirer parti des fortes densités de proies. La prédation sur les poissons par les harles a été moins étudiée que la prédation par les cormorans, ce qui pose des difficultés pour définir les impacts sur les populations de poissons. Les harles sont perçus comme un problème pour les parcours de pêche sportive, en particulier dans les rivières à salmonidés. Leur régime alimentaire a montré que les salmonidés juvéniles sont un élément important de ce régime dans certaines parties de l'aire de répartition de l'oiseau. Les smolts, par exemple, seraient les cibles privilégiées des harles. Sur certaines rivières, comme la Tweed en Écosse, la prédation par le harle lors de la dévalaison des saumoneaux est citée comme un facteur clé, facteur affectant la valeur économique de la pêche touristique du saumon. »

Articles dont sont issus ces textes à lire ICI et ICI.

« Il y a trente ans, il n'y avait aucun harle sur le Wye. Selon l'enquête du MAFF de 1999, jusqu'à 98% des tacons de saumon produits dans l'Upper Wye sont consommés par ces derniers »

Article à lire ICI.

Nicolas : Nous sommes d'accord pour dire que c'est la qualité de l'eau qui est à l'origine de la baisse des effectifs, mais de toutes évidences, on ne peut pas dire que les prélèvements des harles bièvres soient négligeables pour autant ?

PPVA : Nous ne sommes pas d’accord avec ce constat « globalisateur »: Il est trop facile de mettre toutes les rivières dans le même panier: Oui, bon nombre d’entre elles se dégradent, mais certaines, notamment dans l’Ain, passent (pour l’instant) les années et les différentes sécheresses sans aucun souci thermique ou oxymétrique : Le haut Veyron sur notre parcours, mais aussi la Valserine, le Furans, les contre-canaux du Rhône ou encore la moyenne Albarine (Torcieu) n’ont aucune raison de voir leurs populations de poissons s’effondrer de la sorte : Les eaux restent relativement abondantes, fraiches et oxygénées tout l’été, et la nourriture ne manque pas. Pour vous donner un ordre d’idée, l’état écologique de ces rivières est bien meilleure que celui de vos rivières jurassiennes.  Mais sur ces différents parcours, les populations de poissons ont commencé à décliner proportionnellement à l’apparition et surtout la nidification du Harle Bièvre: Lorsqu’on a vu un groupe de Harle prendre toute la largeur d’un petit cours d’eau et nettoyer de façon systématique chaque cache ou galet de ses habitants, on ne peut pas s’étonner de se retrouver face à de véritables déserts piscicoles. Et ce n’est pas parce que la majorité des rivières se dégradent que nous devons accepter sa présence en nous disant simplement « ben de toute façon, c’est tout pollué ! ». Non, les dernières populations viables de poissons d’eau douce, et notamment les espèces en difficultés comme les salmonidés, doivent être préservées coute que coute, quitte à devoir dénoncer la présence d’un oiseau qui n’apporte aucune plus-value à la biodiversité de nos cours d’eau : le jour où toutes nos espèces piscivores autochtones seront en bonne santé, et notamment la Loutre, là , nous pourrons nous dire « il y a de la place pour un nouvel arrivant », d’ici là, nous devons combattre toutes les espèces invasives comme le Harle.

Nicolas : Pour mieux comprendre l’efficacité terrible de cet oiseau, quels sont ses modes de chasse, qu'est-il capable de faire ou de ne pas faire ?

PPVA : Il faut d’abord se rappeler d’une chose : c’est un oiseau originellement inféodé aux milieux marins et côtiers : Dès lors, sa morphologie est faite pour lutter contre les plus puissants courants, et pourchasser des poissons marins bien plus rapides et endurants que n’importe quel poisson d’eau douce. L’une de leurs techniques favorites pour chasser des poissons grégaires vivant en banc est de taper des ailes et nager très rapidement en zigzag en surface afin de séparer les poissons, puis plonger pour attraper les proies isolées. Une vidéo permet de visualiser cette chasse très particulière et surtout prendre conscience de leurs capacités physiques hors-norme : la taille du poisson engloutit en quelques instant est tout aussi impressionnante que leurs performances physiques :

En plongée, durant des chasses plus « classiques » en lac ou dans plusieurs mètres d’eau, il a les mêmes aptitudes qu’un Cormoran :

L’une de ses autres caractéristiques uniques est sa capacité à chasser dans quelques centimètres d’eau, uniquement la tête sous l’eau, en marchant ou nageant, comme un canard de surface qui cherche des végétaux :

Autre problème de taille, une femelle et sa dizaine de petits se mettent systématiquement en ligne pour chasser en cherchant dans toutes les caches et interstices. Leur efficacité , du plus petit ruisseau à la plus grande rivière n'a aucun équivalent chez les prédateurs piscivores.

Nicolas : Le fait que cet oiseau ne soit pas autochtone et qu’il n’ait pas de prédateur est donc un véritable problème : Quelles sont alors les solutions ?

PPVA : Il n’y a qu’une seule solution envisageable : obtenir des autorisations de tir, que ce soit avec certaines dérogations comme pour le Cormoran ou, dans l’idéal, obtenir son classement en tant que nuisible (car allochtone), au même titre que la Bernache du Canada par exemple. Pour rappel, cette dernière a longtemps été inscrite sur la liste des espèces protégées, bien qu’allochtone comme le Harle, et ce n’est qu’en 2009 qu’un arrêté ministériel a permis de la sortir de cette liste, puis, en avril 2012 de l’inscrire sur la liste des espèces classées nuisibles. Que ce soit de la régulation(Cormoran) ou de la destruction (Bernache du Canada), on peut faire bouger le ministère de l’environnement et la réglementation concernant les oiseaux, avec de la volonté et un argumentaire fort.

Pour en arriver là, nous devons être organisés, et jouer du poids de notre réseau. Pour les « simples » pêcheurs qui croisent régulièrement ces oiseaux : faites des photos ou vidéos, notamment lorsque vous les voyez sur de nouveaux secteurs. Remontez ces photos et informations à l’AAPPMA concernée, et n’hésitez pas à publier sur les réseaux sociaux :

Pour les AAPPMA, il y a un peu plus de boulot : Faire un maximum de photos et vidéos, essayez de communiquer dans la presse locale, où notre réseau est souvent très apprécié, comme l’a fait par exemple l’AAPPMA de Bellegarde sur Valserine : Article à lire ICI.

Sur les réseaux sociaux aussi, partager les articles et autres publications sur cet oiseau. Les AAPPMA doivent également remonter ce problème à leurs fédérations départementales respectives par mail ou courrier avec AR, mais aussi sous forme de vœux à leurs assemblées générales de la fédération. Les fédérations départementales de pêche doivent quant à elle prendre conscience de l’enjeu et, si possible :

Présenter l’espèce durant leur assemblée générale, ou de nombreux acteurs politiques ou institutionnels sont présents, afin de les sensibiliser sur le sujet. Nous souhaitons d’ailleurs rappeler que suite à l’AG de la fédération de pêche de l’Ain, le conseil départemental de l’Ain a officiellement écrit au ministère de l’environnement pour connaitre les modalités réglementaires envisageables afin de pouvoir réguler cette espèce. C’est à notre connaissance la 1iere demande officielle formulée par un département au ministère. Il est important de noter que dans l’Ain, notre conseil départemental a toujours soutenu ses pêcheurs, et nous les en remercions.

Contacter officiellement la FNPF pour lui demander sa position, et qu’elle intervienne également auprès du ministère pour discuter des mesures envisageables.

Nous devons tous ensemble lutter contre la méconnaissance des pêcheurs et plus généralement du grand public autour de cette espèce. Informer sur son caractère allochtone et sur les introductions et autres nichoirs dont il a bénéficié. Formuler par le biais de nos différentes structures des demandes officielles de régulation ou reclassifications de l'espèce.

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